Une récente étude a fait le tour des travaux publiés en matière de bien-être équin depuis les années 80. On y apprend que le volume de la littérature scientifique sur le sujet a augmenté de façon exponentielle et que l’Europe en est le leader. Les thèmes les plus abordés sont le stress, le transport, le comportement et la douleur, tandis que les études sur le bien-être à l’abattoir ou les indicateurs positifs de bien-être sont plus rares.
Il est loin le temps où le bien-être n’était défini que par l’absence d’aspects négatifs, l’animal qui ne souffrait pas de faim, de soif, d’inconfort, de peur, de douleur et de maladie, tout en ayant la possibilité d’exprimer le comportement de son espèce, étant considéré comme bien portant. Ces quarante dernières années ont permis d’élargir le cadre de ces exigences minimales, avec l’ajout d’émotions positives. Ainsi est né le fameux modèle fondé sur les cinq champs du bien-être animal : celui-ci s’évalue en intégrant des indicateurs positifs qui vont bien au-delà des cinq besoins fondamentaux originels. L’évaluation du bien-être prend dorénavant en compte l’épanouissement de l’animal. Une révolution !
Dans cette vaste revue documentaire, les auteurs ont donc concentré leurs recherches sur l’évolution des travaux liés à ces aspects positifs, autour de deux axes : la répartition géographique des publications sur le bien-être des chevaux durant les quatre dernières décennies, et l’identification des thèmes les plus étudiés, tout en mettant en évidence les lacunes en termes de connaissances scientifiques. Leur analyse offre une perspective sur les tendances dans le domaine de la recherche liée au bien-être du cheval.
Ainsi, il est apparu que le nombre de publications sur le bien-être des chevaux augmente de façon exponentielle depuis les années 80, principalement sur le continent européen. Le rôle pionnier et moteur de l’Europe peut surprendre, vu la mise en avant régulière des études scientifiques anglo-saxonnes sur le sujet. Mais le constat est clair : l’Europe s’inscrit dans une dynamique scientifique de la protection et de la promotion du bien-être des chevaux, notamment des pays à la forte culture équestre comme l’Allemagne, la France, l’Italie ou le Royaume-Uni.
Parmi les sujets statistiquement les plus importants en lien avec le bien-être équin, on retrouve prioritairement le transport, les réponses comportementales du cheval au stress et la gestion de la douleur, ce qui souligne que les indicateurs négatifs de bien-être sont davantage étudiés. Neuf thématiques majoritaires sont ressorties, comme les indicateurs de stress, l’évaluation de la douleur et de l’état mental, l’équitation et la relation cavalier-cheval, la gestion de la reproduction, l’impact positif d’une bonne santé, les équidés de trait et de travail, les pratiques et les problèmes de transport.
De nombreux sujets importants, qui jouent pourtant un rôle fondamental dans le bien-être du cheval, n’ont pas été abordés ou très peu, ce qui indique un intérêt scientifique mineur à leur égard. Parmi les lacunes constatées : le bien-être des chevaux destinés à la production de viande. Bien qu’environ 800 000 chevaux soient abattus chaque année dans le monde pour la consommation humaine, la littérature sur ce sujet est très limitée, notamment concernant l’évaluation du bien-être à la ferme des chevaux de boucherie et lors du protocole d’abattage. Et pourtant, c’est un vrai sujet : qu’en est-il de l’abattage en l’absence de chaînes dédiées et donc adaptées à la morphologie de cette espèce ? Quel est l’état physiologique, comportemental et de stress des chevaux confinés pendant les périodes d’engraissement avant l’abattage ? De nombreuses questions se posent aussi quant à l’impact du transport sur les chevaux destinés à la consommation (type de transport, durée, conditions de transport, etc.). Une approche globale est indispensable, vu la cartographie des mouvements des équidés de boucherie dans le monde.
En fin de compte, si les recherches ont initialement été motivées par des considérations éthiques et une attente sociétale, puis par des intérêts économiques et politiques, il apparaît que la sensibilisation du public n’a fait que croître depuis quarante ans, au fil des publications scientifiques, poussant les législateurs à revoir (ou pas) la réglementation. Selon les auteurs de l’étude, la réglementation doit être plus précise et concerner exclusivement les équidés, qui manifestent des besoins différents des autres animaux domestiques, notamment en raison de leurs multiples utilisations. Ainsi, de nouvelles lois devraient être élaborées spécifiquement pour cette espèce. Le cheval est considéré comme l’une des espèces les plus polyvalentes, à la fois animal de sport, de compagnie, de travail et de rente. C’est en raison de ces multiples usages que les lois sur la protection du bien-être des chevaux sont moins développées que pour d’autres espèces, avec seulement des lignes directrices dans certains pays. De plus, certaines lois sont limitées et non exhaustives car elles associent souvent les chevaux à d’autres animaux d’élevage, sans tenir compte de leurs différents besoins liés à leurs différents statuts. Enfin, cette revue de la littérature sur le bien-être du cheval suggère que certains thèmes importants méritent d’être davantage explorés, car ils nécessitent davantage de preuves scientifiques, exigées par la société pour définir des paramètres objectifs et quantifiables permettant de mesurer le bien-être animal et d’apporter des solutions aux principaux problèmes rencontrés.